Retour de flamme du web social

Le web social a donné la parole aux clients. Ces derniers l’ont prise, et ne sont pas prêts à la lâcher. Mais certaines marques ne semblent pas avoir pris conscience de cette inversion du rapport de force. Elles risquent ainsi de commettre une erreur grave en cherchant à tout prix à reproduire sur les réseaux sociaux  le modèle de communication de masse qu’elles ont pratiqué pendant des décennies. Internet n’est pas la télévision, combien de temps va-t-il falloir le répéter ?

L’interactivité d’Internet provoque  bien une révolution au sens premier du terme, elle entraîne un retour à l’origine. En effet  le web social permet de comparer les offres, de s’appuyer sur l’expérience d’autres utilisateurs, de faire ou défaire la réputation d’une marque. Pour choisir, les internautes comparent les prix en un clic et s’appuient sur les avis des utilisateurs  ou de bloggers. Le web social impose aux marques de revenir aux fondamentaux : un objet  ou un service de qualité, disponible, vendu à un juste prix, et produit dans des conditions honorables. Et j’insiste sur le verbe imposer. Si le web social met à disposition de nouvelles armes de communication massive, elles sont d’abord aux mains des internautes. Attention donc à ne pas pousser les mauvais messages sur ces réseaux (c’est-à-dire bientôt à la majorité des clients), car le retour de flamme sera brutal.

Pourquoi chercher ainsi à tout prix (et le plus souvent à un prix exorbitant) à transformer les clients en amis ou followers ? Une fois pour toutes, les vrais gens dans la vraie vie ont rarement envie d’engager la conversation avec une marque. Ils ont des amis, des petites copines, des grands-parents ou des inconnu(e)s à des terrasses de café avec lesquels ils ont envie d’engager la conversation. Qui peut raisonnablement avoir envie de se lier d’amitié ou de suivre les activités quotidiennes d’un produit de grande consommation ? Certes, certaines marques peuvent se targuer d’opérations de pure branding réussies, notamment sur Facebook. Mais ces marques sont rares et étaient en général sur-puissantes avant d’aller sur Facebook… N’est pas Starbuck, Apple ou Nike qui veut. Pour  l’immense majorité des marques, l’exercice demeure périlleux et nécessite des trésors de créativité pour se maintenir dans la durée.

Cela ne signifie pas que les marques n’ont rien à faire sur les réseaux sociaux, bien au contraire. Ces réseaux sont une formidable caisse de résonnance qu’il serait dangereux d’ignorer et sur lesquels il est important d’investir. Mais il est plus simple et plus prudent d’écouter avant de s’exprimer  à tout prix.

  • Les clients prennent parfois la parole  sur les réseaux pour s’enthousiasmer de la qualité d’un produit. Dans ce cas-là, l’entreprise peut s’en féliciter, continuer dans cette voie et éventuellement remercier ce client pour son soutien.
  • Malheureusement, les clients sont surtout là pour se plaindre, voire se défouler, suite à un mécontentement… et dans ce cas-là  Twitter ou Facebook permettent heureusement d’écouter et de répondre très rapidement. Encore faut-il mettre en place les équipes et les outils capables de répondre vite et bien. Ce client mécontent a acheté un produit et a été déçu. Ne mérite-t-il pas plus d’attention qu’un potentiel prospect à qui on va proposer des jeux concours pour qu’il devienne un pseudo-ami sur Facebook ?
  • Il est aussi  crucial d’écouter pour détecter et éteindre au plus tôt la rumeur malveillante. La diffamation peut se propager aussi vite que le commentaire légitime, et il serait suicidaire d’y rester sourd. Se défendre n’est pas un manque d’ambition. Il est important pour les grandes marques de mettre en place une stratégie de gestion des risques online.
  • Enfin et surtout, les clients parlent aussi de tous les concurrents et/ou des produits qu’ils espèrent pour demain. Les réseaux sociaux offrent ainsi à chaque minute une source précieuse d’informations permettant d’anticiper les tendances du marché. Il n’y a (presque) qu’à se baisser pour récupérer cette manne marketing, voire des prospects auto-déclarés. Encore faut-il se baisser…

Le client-internaute est en train de faire sa révolution, il s’oppose au pouvoir en place de la pure communication publicitaire, il demande à être écouté, il s’octroie la capacité de choisir.

Les marques doivent se rappeler qu’elles sont avant tout là pour signaler l’excellence d’un produit. Ce dernier me semble devoir être (à nouveau ?) premier dans l’ordre des priorités de l’entreprise. De nombreux outils de gestion d’e-réputation existent comme. La révolution du web social provoque un réjouissant retour au point de départ : un client qui achète au juste prix un produit de qualité. Qui va s’en plaindre ?

Illustration : « Combat de la rue de Rohan le 29 juillet 1830  » ,  Paris,  Musée Carnavalet, Hippolyte Lecomte (1781-1857)

Author

Directeur Général Mathieu a rejoint AT Internet en 2000 et officie maintenant en tant que Directeur Général. Il est également Professeur à l’Université de Bordeaux III. Mathieu est Agrégé de Lettres Modernes et possède un D.E.A. en Sciences de l’Information avec une recherche approfondie sur la mesure de l’audience online. Il est régulièrement invité à s’exprimer dans les Ecoles de commerce et lors de conférences spécialisées.

2 Comments

  1. L’interactivité sur internet est devenu un outil essentiel de croissance de la performance d’une entreprise…la présence active d’une société sur Internet augmente la confiance des clients qui peuvent ainsi être au courant à tout moment avec les produits et les services proposés…

  2. Pingback: 6 notions clés pour mesurer l'E-reputation | Blog Web Analytics