MULTI-CHANNEL

Nous vous proposons de faire le point sur les différents termes utilisés aujourd’hui pour décrire l’évolution récente du commerce dont la performance se joue désormais sur plusieurs canaux.  Que signifient multicanal, cross canal et omni canal ? Dans cet article, nous aborderons également la question du suivi des performances dans un contexte Multicanal avec, en parallèle, la problématique de la protection des données personnelles.

« Ce qui se conçoit bien s’énonce clairement… »

Le terme Multicanal caractérise l’expérience d’un client qui utilise les différents supports mis à la disposition par l’entreprise pour effectuer ses achats. Les supports sont le magasin, le catalogue, Internet, le mobile, la tablette, la télévision, le centre d’appels, etc…

Le multicanal n’est pas nouveau, puisqu’avant l’avènement d’Internet et du mobile, il était possible d’acheter sur différents canaux : magasins, centres d’appels, catalogues, … Ce qui est nouveau, c’est la multiplication des canaux disponibles : ordinateur, smartphone, tablette, bornes interactives, télévision connectée. Le nombre de canaux va continuer à augmenter avec les objets connectés comme la voiture, le réfrigérateur, etc…

Le terme de Cross canal caractérise l’expérience d’un client qui fait une utilisation combinée de plusieurs canaux pour un même achat. Par exemple, le client imprime une configuration d’un produit sur le site Internet et va en magasin l’acheter ou bien le client fait son choix sur le catalogue et va acheter le produit directement sur le site Internet ou encore le client effectue son achat sur sa télévision et va retirer son produit dans le magasin le plus proche.

Le terme d’Omni canal vise à décrire l’utilisation simultanée de deux canaux : le mobile dans un magasin ou la tablette sur le canapé devant la télévision. Le terme est également utilisé pour qualifier la nécessaire cohérence entre les différents canaux afin que les clients puissent interagir à travers les canaux de manière fluide et pratique.

Cela implique que les configurations, les choix effectués sur un canal soient mémorisés et pris en compte sur chaque canal. Imaginez que vous soyez obligé de recréer un compte en passant d’un ordinateur à une tablette, ou à la caisse d’un magasin.

Ces termes nouvellement apparus sont là également pour accompagner un discours venu des prestataires, largement relayé par les experts du marketing digital qui se résume à la sentence suivante : les commerçants qui ne pensent pas « multicanal » sont voués à disparaître. Il faut tout d’abord faire preuve de discernement dès l’instant où des jugements de cet ordre sont exprimés de manière aussi péremptoire et sans chiffres à l’appui. Et ce n’est pas le fait que tout le monde répète la même chose qui fera que cette chose gagne en vérité.

Démonter les croyances autour du Multicanal

Multicanal, Cross canal, Omnicanal, quelle différence ?Vos données sont là pour vous aider et démonter les nombreuses croyances qui entourent l’émergence du multicanal.

#1 – L’affirmation que les clients aiment utiliser tous les canaux à disposition du moment qu’ils sont disponibles.

Si les clients utilisent plusieurs canaux, ce n’est pas pour le plaisir d’utiliser plusieurs canaux, c’est qu’ils y trouvent intérêt. Cela répond à l’un de leurs besoins :

  • économiser de l’argent lorsque le mobile est utilisé pour profiter en magasin de la toute dernière promotion ou lorsque le produit est retiré en magasin pour ne pas avoir à payer les frais de port.
  • réduire les risques lorsque l’acheteur va en magasin pour voir de plus près le produit qu’il a découvert en ligne ou qu’il effectue une réservation du produit depuis son téléphone mobile de peur que le produit ne soit plus disponible en magasin.
  • réduire les efforts lorsque l’acheteur fait son choix sur son catalogue papier et insère le numéro de référence du produit sur l’application mobile pour se le procurer.
  • gagner du temps lorsque l’acheteur présente le produit sur la télévision connectée afin d’obtenir l’accord de toute la famille et l’achète tout seul dans le magasin proche de son travail.
  • obtenir plus d’informations lorsque le mobile est utilisé en magasin pour consulter une fiche technique plus détaillée.

#2 – L’affirmation que tous les canaux doivent proposer la même offre.

La peur que les clients ne puissent pas trouver un produit sur tous les canaux à disposition incite les commerçants à offrir la même offre sur tous les canaux. Le risque est de sous-estimer les spécificités de chaque canal et l’existence de segments de clientèle cible différents pour chaque canal : jeunes sur mobiles, catégories plus âgées sur le catalogue. Une étude Mappy – BVA – Groupe Novedea confirme dans la slide 22 qu’il existe une relation entre l’âge, la catégorie socio-professionnelle et la propension à acheter sur Internet ou en magasin physique. La démarche qui vise à proposer la même offre sur tous les canaux échoue par conséquent à capitaliser sur les différences de chaque canal.

#3 – L’affirmation que le fait qu’un client utilise plusieurs canaux l’incite à acheter.

Nous avons tous lu des assertions du type Le Multicanal offre un taux de conversion plus élevé, ou Un client multicanal réalise un chiffre d’affaires six fois supérieur à un client monocanal web. Est-ce vraiment le multicanal qui génère ce taux de conversion plus élevé ? Certes, proposer une offre sur plusieurs canaux permet de ne pas rater les ventes auprès de personnes qui aiment utiliser plusieurs canaux. Mais ce qui engendre le taux de conversion plus élevé, n’est-ce pas plutôt l’intention d’achat qui est plus forte chez les personnes qui utilisent plusieurs canaux ? Chercher à tout prix à faire passer les visiteurs d’un canal à un autre ne vous fera pas forcément augmenter votre chiffre d’affaires. L’intention d’acheter prime sur l’utilisation de multiples canaux. Si votre produit est mauvais, vous aurez beau offrir une expérience unique à travers vos canaux de distribution, vos ventes ne décolleront pas.

Toutes ces affirmations, ce ne sont que des hypothèses. Le travail d’un analyste web, c’est de les confirmer avec des chiffres ou de les infirmer le cas échéant. L’analyste web doit aider son Responsable Marketing à faire le tri parmi toutes les opinions publiées en ligne. Par conséquent, il faut tester et analyser les données.

AT Internet via sa solution Web Analytics vous fournit des données sur deux principaux canaux (web et mobile). Les données enregistrées en magasin ou centre d’appels peuvent être rapatriées par API et compléter les données online.

Reste la problématique de la protection des données personnelles des prospects et clients. AT Internet est très vigilant sur ce sujet et notre Analytics Suite 2 est 100% compatible avec la RGPD. Nous considérons l’ensemble des données que nous collectons comme « donnée personnelle » et à ce titre nous y appliquons le même niveau d’attention et de protection.

La première partie de cet article sur le cross canal nous a montré deux points extrêmement importants :

  • D’une part que le problème n’est pas aussi simple qu’il n’y paraît.
  • D’autre part que l’on tente de nous imposer un discours réducteur et péremptoire dont tout analyste se méfie par nature.

Cela nous amène naturellement au tracking du « multicanal ». On constate que l’offre des différents prestataires occulte quelques contraintes importantes.

Gestion et analyse des performances du « multicanal » : on ne vous dit pas tout

Posons d’abord le postulat de départ : l’expérience multi-device (pc, tablette, smartphone, tv connectée, …) est incontestable, elle crée donc une interaction marque/consommateur de type « multicanal ». Examinons ensuite les cas les plus fréquents de tracking et de reconnaissance sous deux angles complémentaires : la pertinence et le respect de la vie privée.

Pour suivre correctement cette expérience utilisateur (et donc l’optimiser), il est impératif de pouvoir associer UN consommateur à UNE SERIE de matériels, dont certains sont exclusifs, et d’autres en utilisation partagée… A défaut de cette clé, tous les résultats seront sujets à caution, et toute analyse en découlant le sera tout autant. Et cette clé peut être obtenue de différentes manières, dont certaines posent le problème du consentement éclairé du consommateur.

Pour illustrer cela, prenons quelques exemples :

Nous avons (presque) tous été confrontés, lors de l’utilisation de services grand public, à une incitation à communiquer en plus de l’adresse courriel, un numéro de portable personnel, « pour nous protéger », bien sûr. Ne peut-on raisonnablement imaginer que derrière cette bienveillance affichée ne se cache un moyen simple de reconnaissance du visiteur mobile, de couplage expérience web/expérience mobile ? A titre d’exemple, l’utilisation du « fingerprinting » à des fins de ciblage publicitaire se pose déjà depuis plusieurs années aux Etats-Unis.

Pendant que les bases de données se remplissent allègrement sans systématiquement respecter les principes du RGPD, étudions ces fameuses techniques de reconnaissance.

Quels sont les systèmes de reconnaissance ?

# Cas le plus simple, celui du visiteur identifié : chaque utilisateur décline son identifiant personnel, qui reste le même quel que soit le canal utilisé (cela se fait généralement lors de la création d’un compte utilisateur sur le site). Dans ce cas, le consommateur a volontairement donné son identité et accepté d’être reconnu. Il le sera quel que soit le canal utilisé du moment qu’il se connecte à son compte et l’analyste pourra décortiquer son expérience complète avec la marque.

  • Pertinence : exactitude et exhaustivité garanties.
  • Respect de la vie privée : aucun problème dès lors que le consommateur a été clairement informé de l’utilisation des données au moment de la création de son compte.

#Système de reconnaissance par cookie (texte ou flash) :

Un cookie est un fichier qui vient s’ajouter dans le navigateur et stocker des données d’utilisation. Il nécessite le consentement explicite du consommateur pour pouvoir être mis en place. Un cookie mis en place restera sur le navigateur concerné pour une durée de 13 mois. Si l’utilisateur se connecte sur votre site web via un autre navigateur, un autre cookie sera alors ajouté sur ce nouveau navigateur avec le consentement de l’utilisateur. Si les cookies sont refusés (par défaut ou refus explicite), il n’y a pas de reconnaissance. De même, si les cookies sont régulièrement effacés, le visiteur est réputé « nouveau visiteur » à chaque visite suivant l’effacement.

Dans le cas du refus des cookies par les utilisateurs, il reste possible de recourir au fingerprinting pour obtenir des informations sur le visiteur et marquer son navigateur, mais cette solution rentre en opposition avec plusieurs principes énoncés dans le RGPD.

  • Pertinence : si le navigateur est reconnu, le visiteur, lui, ne l’est pas. Dans le cas d’un ordinateur familial, trois visites enregistrées via le même navigateur peuvent provenir de trois personnes différentes. Prenons l’exemple d’une famille de 3 personnes, un couple et leur fils. Chacun visite le même site musical via Firefox: un des parents est passionné de reggae et recherche de vieux enregistrements de Steel Pulse, l’autre adore Stromae, et Junior ne jure que par Daft Punk … On peut raisonnablement douter de la pertinence du profil visiteur qui sera attribué par la suite, car les cookies ne permettront pas de faire la distinction entre les 3 individus…
  • Respect de la vie privée : A la condition d’un accord explicite de la part de l’utilisateur, les cookies permettent la reconnaissance d’un navigateur web pour une durée maximale de 13 mois.

#Système de reconnaissance par croisement de bases de données : c’est le système utilisé par les Adexchange et DMP pour la gestion publicitaire, mais nous avons aussi l’exemple récent de grandes entreprises qui signent des partenariats avec les réseaux sociaux. Sur le principe, une entreprise va pouvoir croiser sa base de données avec la base de données d’une autre entreprise pour enrichir le profil de ses utilisateurs ou générer de nouveaux contacts. Cependant, ce procédé n’est une fois de plus possible qu’avec le consentement explicite de l’utilisateur pour chaque utilisation potentielle de ses données. Il devra être clairement informé de ces partenariats et consentir individuellement au partage de ses données avec chaque acteur impliqué. Cette procédure est très difficile à mettre en place et ce système de reconnaissance reste souvent litigieux.

  • Pertinence : la pertinence est ici inversement proportionnelle au respect de la vie privée.
  • Respect de la vie privée : cette pratique n’est théoriquement possible qu’en obtenant le consentement de l’utilisateur quant au partage de ses données avec chaque acteur impliqué.

En résumé, l’analyse multicanal, pour être efficace, repose essentiellement sur la reconnaissance du visiteur à travers plusieurs canaux et plusieurs interfaces matérielles. Elle utilise pour cela divers outils tels que les cookies, la création de compte ou le croisement de bases de données. Cette reconnaissance est très difficile à obtenir de façon exhaustive, sauf en ayant recours à une identification systématique du visiteur (site accessible uniquement après log-in par exemple) ou à des procédés en contradiction plus ou moins flagrante avec les principes de confidentialité et de respect de la vie privée qui entourent la RGPD.

Author

Knowledge Manager Formé aux achats et à la gestion par Carrefour, à la vente par Procter & Gamble, JM a évolué dans la grande distribution à des postes de direction pour de grands groupes en hypermarché, centrale d’achats puis logistique, avec une expérience expatriée en Afrique en qualité de Directeur Central. Fin 1995, JM crée une start up internet puis après trois ans (fin 1998) rejoint l’équipe AT Internet d’Alain Llorens dans laquelle il prend des responsabilités commerciales et est au cœur de l’aventure pionnière du Web analytics. A près de 55 ans et 13 ans d’ancienneté, JM exerce (depuis 2009) la fonction de Knowledge Manager."