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Merwan Benarbane présente ici le parcours qui l’a conduit jusqu’à son poste actuel de chef de projet web analytics chez Bouygues Telecom et partage avec nous ses challenges, ses réussites, ses conseils et sa vision du métier aujourd’hui et pour le futur.

Comment êtes-vous devenu Web analyste ?

Je suis diplômé de l’école de commerce de Clermont Ferrand avec une spécialisation en marketing online / BI. J’ai découvert le monde de la webanalyse en 2007, au cours de mon apprentissage chez Hewlett Packard. J’étais à l’époque « Junior Marketing Online » auprès de Thierry Pires, webmaster, et Jacques Exertier, responsable marketing online. Tous les deux m’ont donné la possibilité de passer des journées entières à décortiquer les stats des campagnes, pour faire l’analyse ROI des campagnes SEM et Display. J’aimais comprendre techniquement comment la donnée est enregistrée, comment on la récupère,  et aussi comprendre les différences entre les outils de mesure (notamment site centric versus adserver). Par la suite, j’ai travaillé pendant 3 ans chez un éditeur webanalytics, « Eulerian » avec trois types de missions différentes : support, consulting et formation.

Aujourd’hui chez Bouygues Telecom, je suis Chef de projet Web Analytics et je m’occupe de la mesure de tous les sites Bouygues Telecom et B&YOU.

En quelques mots comment définiriez-vous l’activité digitale de votre entreprise ?

Bouygues Telecom a la volonté forte d’avancer et d’innover dans le digital à tous les niveaux (webanalytics, SMO, SEO, industrialisation d’AB testing et Ad centric…). On parle aussi de la digitalisation des points de vente, de la reconnaissance implicite des clients sur les sites prospects, de la mesure des set up box… Il y a une vraie prise de conscience qui touche tous les acteurs de la Direction Digitale Bouygues Telecom et de B&YOU.

Aujourd’hui on mesure avec l’outil d’AT Internet 150 sites, applications mobiles, intranets et extranets.

Comment est organisée l’activité web analytics dans votre société ?

L’équipe webanalytics travaille en transverse avec toutes les entités de Bouygues Telecom. Nous sommes une équipe de 3 personnes rattachée à la Direction Digitale. Cette Direction comporte notamment la gestion des sites boutique grand public et pro, l’espace client, le hub, les sites d’animations et de jeux B&YOU etc.

On compte aujourd’hui de 300 à 350 utilisateurs réguliers de la solution AT internet Tous les intranets sont également mesurés avec la solution d’AT internet ce qui nous amène aussi à collaborer avec les autres départements, comme par exemple les RH et les commerciaux pour leurs intranets respectifs. On compte aujourd’hui de 300 à 350 utilisateurs réguliers de la solution AT internet chez Bouygues Telecom.

Lorsqu’un nouveau projet est initié, nous intervenons d’abord auprès du marketing afin de le guider dans son choix de KPI. Ensuite, nous lui livrons un plan de marquage à intégrer. Une fois celui-ci mis en place, nous vérifions auprès de la MOE si nos tags ont été bien positionnés pour validation. La partie « rapports » et « analyse des données » n’est pas de notre ressort, c’est l’équipe « Performance » qui s’en charge. On génère de temps en temps des Tableaux de Bord automatisés via Data Query* mais de manière très ponctuelle (mise en place d’un tableau de performance spécifique B&YOU par exemple).

Quelles sont vos missions et vos challenges actuels ?

Notre challenge c’est surtout d’évangéliser les équipes en interne sur le sujet web analytics et également de faire monter en compétence chacun des acteurs de la Direction Digitale. Pour cela, nous nous appuyons notamment sur des formations à la fois techniques et webmarketing. Certaines sont dispensées par les équipes AT Internet. D’autres sont faites directement par notre équipe en interne lorsque les besoins sont plus spécifiques. Dans un projet web de grande envergure, la partie mesure n’est pas encore automatiquement bien prise en compte alors qu’elle est indispensable. Comment est-il possible d’optimiser ses projets sans mesurer la performance ?  Auparavant, nous devions lutter contre des partis pris et convaincre les responsables de projet de l’utilité des outils web analytics.

nous bénéficions d’une volonté forte du management qui a décidé qu’aucun projet ne sortirait sans mesurDepuis 2 ans, nous bénéficions d’une volonté forte du management qui a décidé qu’aucun projet ne sortirait sans mesure chez Bouygues Telecom. Si notre équipe ne valide pas le marquage, cela représente un « NO GO » pour la mise  en production. Aussi, notre hiérarchie nous appuie fortement et fait bien comprendre que la mesure est indispensable, nous arrivons alors à nous positionner comme support, comme aide, et cela facilite le contact avec les différentes équipes.

Nous disposons aussi de la puissance d’une régie avec un consultant AT Internet à nos côtés. Il serait impossible pour nous de travailler sans la régie. Tout d’abord parce nous ne sommes  pas assez nombreux, et même si notre équipe a la capacité de le faire, un plan de marquage sera mieux fait, et plus rapidement, par un consultant en régie que par nous- même. La « puissance » de la régie, s’exprime aussi bien dans la partie « implémentation » que dans la « compréhension de la data ». La régie nous apporte de l’efficacité sur l’outil, et nous permet de garantir que la mesure est stable. Pour un site e-commerçant, il est indispensable d’avoir une mesure fiable, surtout dans un contexte de crise où l’on recherche toujours l’optimisation, l’amélioration de la performance. Notre consultante en régie, Christelle, connait parfaitement la solution, comprend d’où vient la data, comment elle est traitée. Elle est une ressource de grande qualité pour nous aider dans le suivi de l’utilisation de la solution.

Si vous deviez nous décrire votre journée type ?

Une journée est rarement la même d’un jour à l’autre ! Nos missions sont très différentes. C’est cela qui est excitant et challengeant. Pour faire simple, on se répartit le temps entre le suivi de l’avancement de gros projets web analytics internes, des études ad hoc, du suivi de debug, des mises en place et le reporting de nos activités. Donc, je peux avoir une journée à ne faire que du webmarketing pour aider une équipe ou un responsable de boutique à valider son tableau de bord : je vérifie que les données sont bien mesurées, que les tags sont bien présents, que la data est disponible ; je peux aussi passer une journée à ne faire que du debug, chercher à comprendre pourquoi un tag ne part pas, pourquoi une vague d’A/B testing n’a pas de mesure propre etc.

Aucune journée ne ressemble à une autre. Cela vient aussi du fait qu’on gère l’implémentation de divers tags pour le retargeting, mail targeting, l’affiliation, des outils d’agents virtuels, les enquêtes en ligne, etc… en plus des tags de web analytics. Nous utilisons pour cela le TMS de Tag Commander.

Selon vous, à quoi ressemblera le futur du web Analytics ?

Nous sommes dans un marché qui est encore jeune et dynamique. Les outils de webanalytics vont devoir suivre le marché et les attentes côté client. Pour ma part j’attends beaucoup du côté de la mesure full côté server pour améliorer les performances de chargement des pages web. On a déjà fait des tests sur les serveurs de B & You, il reste encore beaucoup à faire et des lacunes à combler par rapport aux outils site centric implémenté côté serveur. Par exemple on ne peut pas mesurer les clics, c’est globalement moins précis et insuffisant pour le moment.

J’imagine aussi davantage de ponts entre l’outil web analytics et les autres outils qu’on utilise comme les TMS, l’AB Testing etcJ’imagine aussi davantage de ponts entre l’outil web analytics et les autres outils qu’on utilise comme les TMS, l’AB Testing etc. pour que ces interconnexions entre les différents outils nous facilitent la vie.

Il y aura également plus de liens avec la BI. On a eu deux projets de Big data basés sur la donnée web, on y est arrivé mais ça a été très compliqué à mettre en place. Sans notre consultante en régie, Christelle, on n’aurait pas pu le faire. Il faut bien comprendre la donnée brute pour ensuite l’analyser, tout en s’assurant que la data reste unitaire.

On attend aussi des interfaces plus « user friendly » et intuitives, mais en fait vous avez déjà pris de l’avance avec vos dernières nouveautés : Data Query  pour la création et l’automatisation des Tableaux de Bord et Data manager qui permet de faire du debug sans toucher au code source, là en effet on peut dire qu’avec ces interfaces « le futur c’est maintenant ».

Quelle est votre plus grande réussite en tant que Web analyste ?

Sur la partie ad centric, c’est la mise en place d’une déduplication complètement automatisée (real time attribution), il s’agissait d’un projet technique et marketing complexe pour Brand Alley que j’ai mené chez Eulerian en tant que pilote du projet. Sur l’exploitation d’AT Internet, techniquement on a réussi à faire de la mesure de commande côté serveur.

Ensuite sur le plan humain, je suis très satisfait d’arriver à rendre les gens de plus en plus autonomes côté MOA (définition de leur KPI et utilisation de l’interface), de même que côté MOE (indépendante sur la partie debug).

Faites-vous des utilisations particulières des solutions AT ?

L’interface AT Internet m’a avant tout surpris par la qualité des données site centric, notamment sur la partie tunnel et chemins. Chez Bouygues Telecom, on regarde environ 150 tunnels, chose possible à mettre en place et à maintenir grâce à  la solution et qui va très loin dans le suivi page à page.

Par ailleurs, grâce à  Data manager, on réussit à enlever des tags qui venaient polluer nos données. Sur notre « espace client GP » par exemple, on avait des reliquats de tags difficiles à retrouver car on a des pages avec des multiples iframes gérées par des équipes complètement différentes… Plutôt que d’essayer de retrouver l’historique de l’usage de ces tags, on a préféré supprimer ces tags des reporting grâce à Data manager. On appelle ça chez nous « un joli coup de balai sous le tapis » :). Les tags polluants sont toujours en production, mais on ne les traite plus dans les stats.

Quels écueils avez-vous pu rencontrer tout au long de votre activité de Web Analyste ?

Notre activité est considérée comme importante mais compliquée, car souvent trop technique. Ce que je réponds généralement c’est que dans notre équipe, on n’a jamais fait de développement, nous sommes juste soit technophiles soit un peu curieux. Les problématiques se résolvent avant tout avec du bon sens et aussi un peu d’expérience parfois.

Avec le recul, quel(s) conseil(s) donneriez-vous à un analyste débutant ?

Compliqué de conseiller, car j’ai encore beaucoup à apprendre sur le métier ! Je dirais surtout qu’il ne faut pas hésiter à lire et à contacter les nombreux blogueurs du secteur. On reste encore dans un milieu jeune, le secteur est assez collaboratif et ne se prend pas (encore) trop au sérieux. Il faut profiter de l’expérience des profils plus matures pour apprendre (avec par exemple les membres de la WAA, Nicolas Malo, Julien Coquet, etc..), et profiter du fait qu’ils sont accessibles. Mais rien ne remplace l’expérience professionnelle.

Il faut comprendre ce qu’on mesure, comment est faite la mesure, comment marche un site web ou un navigateurPour un jeune qui débute, ce qui est intéressant c’est  de toucher à la technique et au marketing, cela permet encore de choisir encore vers quelle direction poursuivre sa carrière. Toutefois, d’après moi ce qui est primordial aujourd’hui c’est de comprendre que le webmarketing est obligatoirement technique. Il faut comprendre ce qu’on mesure, comment est faite la mesure, comment marche un site web ou un navigateur pour comprendre des anomalies de stats par exemple.

Qu’est-ce qui vous plait le plus dans votre métier ?

On est à la fois technique/webmarketing/business. La donnée peut être extrapolée de plusieurs façons, on n’est pas cantonné à un aspect technique ou uniquement marketing. J’ai l’occasion d’assister à différents types de comités comme par exemple pour identifier les anomalies survenues sur les sites, donc plutôt techniques, mais aussi des comités de performance purement marketing et business, où on analyse des chiffres, les coûts de revient des ventes etc..

Surtout on a accès à toutes les statistiques de tous les sites, on est au centre de l’activité. Et encore plus avec la gestion du Tag Management, on rentre en contact avec de nombreux éditeurs et avec les personnes en interne qui les ont sélectionnés. On doit comprendre quel est le besoin marketing, on doit réfléchir sur quelles pages on va charger leurs tags. On n’est pas de simples maçons qui posons des tags, on participe aussi à la stratégie marketing, on re-contextualise chacun des besoins.

Merci à Merwan d’avoir partagé ces réflexions riches et éveillées avec nous. L’équipe AT salue au passage ton humour à toute épreuve, il n’apparait pas ici mais il rend notre collaboration très agréable.

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7 Comments

  1. Il faut vraiment aimer décortiquer les chiffres donc pour devenir un web analyste. Même si la fonction semble ne pas trop plaire aux blogueurs, elle est tout de même utile pour analyser son site et faire des rectifications s’il y a lieu. En tout cas, l’interview est très instructif car elle explore vraiment ce domaine.

  2. Christelle Tissot

    Merci Merwan pour ce retour d’expérience.

    C’est un plaisir pour moi-même et AT Internet de partager ces challenges avec toi et les équipes Bouygues Telecom 🙂

    Ce partage participe grandement à l’évolution des solutions AT Internet.

  3. Merci Merwan pour ce retour très instructif. Bravo à la rédaction pour cet article.

  4. Une interview très intéressante en tout cas! On en apprend plus sur les coulisses du web analytics. On peut se rendre compte du travail qui se fait pour nous apporter des infos pertinentes.

  5. Très bonne interview, l’analytics étant un des domaines les plus compliqué du web, même si à première vue ça semble « simple »…

  6. On peut comprendre que les grands groupes veuillent avoir des données réalistes que seul un professionnel du web analytics peut apporter. Un travail qui semble demander beaucoup beaucoup de concentration et de compétences. Un excellent interview en tout cas.